Une première piste évidente : James Lawson
On pourrait considérer que la psychanalyse urbaine est une science initiée par James Lawson à la fin des années 60 au moment où il fonde à Berlin la Fédération Allemande de Psychanalyse de rue sauf que sa première intention n’a jamais été de psychanalyser des villes mais plutôt de démocratiser la pratique de la psychanalyse. L’objectif de James Lawson et de ses principaux adeptes (Bill Tefal, Alan Fryung, James Whynot, entre autres…) était d’abord de rendre la psychanalyse accessible à tous en disposant des divans sur les places des marchés, sur le parking des supermarchés, dans les parcs publics, à la sortie des écoles et même dans des ascenseurs (!?) et en proposant aux passants des thérapies rapides et collectives qui allaient bien sûr à l’encontre des thérapies classiques plus confidentielles et beaucoup plus installées sur la durée...
C’est en expérimentant en milieu urbain ces nouvelles formes de psychanalyse que James Lawson s’aperçoit à quel point les villes influencent la personnalité de leurs habitants et c’est en poussant plus loin sa réflexion qu’il estime nécessaire de psychanalyser les villes afin de comprendre un peu mieux les névroses qui affectent leurs habitants…. On ignore encore aujourd’hui si James Lawson a mené à bien son projet de psychanalyser la Ville de Berlin et celle de Dresde dont il était originaire. Plusieurs témoins prétendent qu’il a été dépassé par l’ampleur de la tâche d’autant qu’à partir de 1967 la fédération allemande de psychanalyse n’aura de cesse de lui mettre des bâtons dans les roues, entraînant sa démission de la race humaine en mai 1968. James Lawson décide alors, pendant dix ans, de vivre en communauté avec les singes bonobos..
Lorsqu’en 1977 il revient à la civilisation, James Lawson ne semble plus s’intéresser à ce projet de psychanalyse urbaine. Par contre, lors de son périple autour de l’Etna, il jette les bases d’un vaste projet de Parc d’attractions para-médicales où la psychanalyse y prendra une grande place. Ce projet, baptisé "L’hôpital de la dernière chance" devait fonctionner à partir d’un jeu de tarots comportant 21 arcanes majeurs + le fou. D’après Whynot, si on associe la carte de la pioche, celle de la faille et celle de la maison-Dieu, on reconstitue implicitement le triptyque qui forme le support ésotérique de la psychanalyse urbaine. Dont acte…
La piste mythologique : Sigmund Freud
La citation ci-dessous, extraite de Malaise dans la Civilisation, montre à quel point Sigmund Freud avait eu l’intuition qu’il serait possible de psychanalyser le monde entier et qu’il était déjà conscient, à l’époque, de l’extrême difficulté de la mise en oeuvre de ce vaste projet.
« L’analogie » existant entre le processus de civilisation et la voie suivie par le développement individuel peut être poussée beaucoup plus loin, car on est en droit de soutenir que la communauté elle aussi développe un Surmoi dont l’influence préside à l’évolution culturelle. Ce serait une tâche bien séduisante pour un connaisseur des civilisations que de poursuivre cette analogie jusque dans ses détails... L’étude attentive du rôle joué par un Surmoi dans les manifestations du processus culturel me semble devoir promettre à qui veut bien s’y appliquer d’autres clartés encore... Si l’évolution de la civilisation présente de telles ressemblances avec celle de l’individu, et que toutes deux usent des mêmes moyens d’action, ne serait-on pas autorisé à porter le diagnostic suivant : la plupart des civilisations ou des époques culturelles – même l’humanité entière peut-être – ne sont-elles pas devenues « névrosées » sous l’influence des efforts de la civilisation même ?... »
Trad. Marie-Laure Cassin. P 4.
La piste situationniste
D’après Lucas Vaneeghem, le so-called Architectonicien de l’ANPU, les origines de la psychanalyse urbaine se situeraient plutôt dans la notion de psychogéographie développée par les situationnistes dans les années 70, l’essentiel de cette théorie étant résumé dans l’article ci-dessous…
De l’art à l’art de vivre Psychogéographie
« La formule pour renverser le monde, nous ne l’avons pas cherchée dans les livres, mais en errant. C’était une dérive à grandes journées, où rien ne ressemblait à la veille ; et qui ne s’arrêtait jamais. »
La psychogéographie est une des préoccupations les plus originales et les plus importantes de l’Internationale situationniste au cours de ses premières années d’existence, tant sur le plan pratique que sur le plan théorique. Elle a cependant été inventée dans la plupart de ses aspects dès l’époque de l’Internationale lettriste, notamment à l’initiative d’Ivan Chtcheglov, dont le Formulaire pour un urbanisme nouveau est publié sous le pseudonyme de Gilles Ivain dans le premier numéro d’Internationale situationniste [1]
Il existe aussi une filiation évidente entre la psychogéographie et certaines expériences surréalistes de l’espace urbain [2]. Pour Debord, l’intérêt essentiel de la psychogéographie est de vouer l’avant-garde au désœuvrement actif. Elle permet de situer le poétique non plus dans des livres ou des tableaux, mais dans un art proprement situationniste, c’est-à-dire dans des expériences ou des projets de construction d’environnements. Elle est, dans un premier temps du moins, la figure la plus emblématique de ce que les situationnistes appellent la « construction de situations ».
Autre piste
« Une image réelle ne pénètre ni ne transcende. Ce qui m’intéresse maintenant, c’est de prendre une histoire fantastique et invraisemblable et de tenter d’aller jusqu’au fond en faisant en sorte qu’elle paraisse non seulement vraie mais encore inévitable. »
Annexe 421
Les huit commandements de la Psychanalyse Urbaine
Élaborés par James Lawson lors d’un pèlerinage à Vienne au numéro 9 de la Berggasse, le lieu où résida Sigmund Freud jusqu’à son exil forcé à Londres en 1938, ces huit commandements constituent incontestablement la base théorique et philosophique de la psychanalyse urbaine.
On peut définir la Psychanalyse Urbaine comme une méthode d’investigation consistant essentiellement dans
Il s’agit aussi d’un travail pour amener à la conscience de ses habitants le contenu psychique refoulé qui a fait qu’on ait pu
La tâche du Psychanalyste Urbain consiste dès lors à démêler, dans le jeu incessant des comportements irresponsables qui sous-tend l’organisation d’une ville, ceux qui, pour en avoir été isolés, sont à l’origine de profonds
L’architecte acquiert à l’école d’architecture une formation qui est à peu près le contraire de ce dont il aurait besoin pour se préparer à la Psychanalyse Urbaine. Son attention est dirigée sur des réalités architecturales plus influencées par la physique des matériaux et toutes sortes de contraintes budgétaires que par un réel souci de traitement médical. Son intérêt pour les aspects
L’analyse urbaine se fait toujours par tâtonnements
L’attente de l’analyste peut encore être décrite comme l’ouverture d’un champ des possibles à l’intérieur même de la ville patiente. Elle refuse, en effet, de considérer la situation actuelle de la ville patiente comme définitive ou
Même si l’objectif de la cure, plus que la prise de conscience des désirs inconscients de la ville patiente, vise à la libération de forces nouvelles, qui poussent les habitants patients au changement et à l’action, on ne peut que redouter la réaction de la population aux prises avec un
On
(*) : Le message codé subliminal mis en évidence par James Whynot lors du fameux congrès de Karosta n’est qu’une des multiples ré-interprétations de ce texte fondamental publiées jusqu’à aujourd’hui... Krypto-numérologue avisé (il prétendait pouvoir détecter des messages codés envoyés par les extra-terrestres via les plaques d’immatriculation de certaines voitures est-allemandes), Whynot aurait ainsi involontairement jeté les bases de la krypto-linguistique, outil couramment utilisé en psychanalyse urbaine pour détecter des messages subliminaux dans les noms mêmes des territoires étudiés.